Erreurs de casting…

Un remaniement  gouvernemental est dans l’air. Il était temps de donner un nouveau souffle à l’action de l’exécutif  car les ratés et les ratages s’amoncellent  à mesure que les erreurs de casting commencent à coûter politiquement cher à la collectivité. La plus spectaculaire étant  celle qui a alimenté  la contestation sociale  la plus choquante du pays :  le cas Chakib Benmoussa qui a réussi le tour de force de provoquer une grève des enseignants du public d’environ deux mois, privant de cours plusieurs  millions  de Marocains. L’homme qu’il ne faut pas…Ce qui a obligé le Premier ministre Aziz Akhannouch  à céder  face à la détermination des grévistes en gelant le statut unifié de la discorde (voir page 5). Or, en politique, un gouvernement qui  capitule  ce ne n’est jamais bon car cela pourrait  donner des idées à d’autres corporatismes et les enhardir…
A part le ministre de l’Intérieur, son collègue des Affaires étrangères et le ministre du Budget qui sont dans l’action et donnent l’impression de maîtriser leurs dossiers, les autres membres de l’exécutif n’ont pas convaincu, préférant  enfiler les perles que mouiller la chemise.
Par manque d’expérience ou méconnaissance de leur rôle,  nombre de ministres semblent déconnectés de la réalité,   confondent souvent dynamisme et agitation ou attendent que  le Roi Mohammed VI lance une grande orientation stratégique pour se décarcasser. La meilleure preuve en a été  administrée par le titulaire du portefeuille du Transport et de la logistique. Il a fallu que le souverain parle dans son dernier discours du 6 novembre de la nécessité d’une flotte marchande dans le cadre du Maroc  atlantique pour qu’il s’empare de ce dossier pourtant très capital. Il n’ y a pas plus paralysant pour un pays que les adeptes de la gestion des affaires courantes qui par peur de se tromper, de se faire remonter les bretelles ou de perdre leur poste  font la grève d’initiative. Que dire de Abdellatif Ouahbi dont les gaffes à répétition escamotent son tempérament de fonceur.

Celui que l’on disait plusieurs fois partant est incapable quand il ouvre la bouche  d’être autrement que dans la provocation et la balourdise.  L’autre Abdellatif, le Miraoui, chargé de l’Enseignement supérieur, n’a montré depuis son arrivée de réelle aptitude que dans le changement des directeurs de son département…
Jamais gouvernement n’a réuni autant de ministres à contre-emploi, futiles autant pour leur département que pour la nation. Prenez par exemple la Transition numérique  et la Transition énergétique, deux secteurs hautement  stratégiques où le Maroc, doté de tous les atouts, doit sérieusement  avancer. Mais les titulaires du portefeuille, respectivement  Ghita Mezzour et Leila Benali, ont donné la nette impression d’être à la traîne, incapables d’impulser la moindre dynamique aux filières dont elles ont la charge. La préposée à la Solidarité, l’Égalité et la Famille Aawatif Hayar  n’a pour sa part  fait parler d’elle que dans la foulée de sa nomination par le scandale lié au recrutement de son mari au poste de conseiller.

Le péché originel vient sans doute des méthodes de recrutement privilégiant les profils bardés de diplômes prestigieux au détriment de la densité du parcours politique et de l’expérience de terrain.

Quant au  professeur bombardé au porte-parolat du gouvernement, Mustapha Baitas, il a innové en réduisant la fonction à une récitation ennuyeuse  hebdomadaire devant une poignée de journalistes des décisions prises en conseil de gouvernement. Difficile dans ces conditions, avec toute la bonne volonté du monde, pour le Premier ministre Aziz Akhannouch, d’imprimer l’efficience voulue à l’action gouvernementale. Certains ministres travaillent, montent au front alors que les autres ne foutent rien.  Il y a tromperie sur la marchandise. Ce n’est pas la dream team que l’on attendait. Ça plombe l’atmosphère.  
Cette situation devient non seulement handicapante mais rejaillit  sur son image de chef de parti locomotive et devient à ce titre comptable aux yeux de la population de l’action de l’ensemble de son groupe.
Le péché originel vient sans doute  des méthodes de recrutement privilégiant  les profils bardés de diplômes prestigieux au détriment de la densité du parcours politique et de l’expérience de terrain.  Le gouvernement actuel en compte un paquet qui  non seulement n’a pas la légitimité populaire conférée par le suffrage universel  mais n’a jamais de surcroît  rien géré de sa vie. Une double peine. C’est ainsi que le pays se retrouve pour des raisons diverses avec des profils survendus à la réputation surfaite qui, côté opérationnel et efficacité, sont loin du compte. Ou avec des éléments  en inadéquation  avec la fonction ministérielle dans sa dimension politique et qui, justifiant parfois d’une expertise technique reconnue dans tel ou tel domaine, peuvent en revanche faire de bons secrétaires d’État dont l’absence pénalise  par ailleurs grandement le gouvernement Akhannouch.
La solution pour rompre avec ces erreurs de casting ? revenir aux fondamentaux de l’action politique qu’il faut réhabiliter  de telle sorte que les partis redeviennent attrayants pour les compétences qui en l’état  actuel des choses les fuient comme la peste. Résultat :  le personnel de l’État est de plus en plus coopté en dehors des structures partisanes et repeint aux couleurs de telle ou telle enseigne…Les structures partisanes, telles qu’elles dysfonctionnent, ne séduisent essentiellement   que les spécimens qui peuplent majoritairement  les collectivités locales. Les alertes commencent à se multiplier. Il est urgent de reconstruire  sur de nouvelles bases la machine à écrémer l’élite qui a la vocation du service de l’État.

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