Deux jours après la signature d’un accord historique avec les Etats-Unis à Doha, les talibans ont annoncé, lundi 2 mars, avoir mis fin à la trêve partielle instaurée le 22 février et reprendre leur offensive contre les forces de sécurité afghanes. Les infatigables baroudeurs des steppes ont justifié leur revirement par le fait que le gouvernement de Kaboul refuserait de libérer quelque 5 000 de leurs militants. En fait, ce retour aux armes des talibans ne surprend pas quand on sait ce mouvement fondamentaliste islamiste s’est fixé depuis 18 ans deux objectifs essentiels à atteindre quand en 2002 les Américains ont envahi l’Afghanistan sous prétexte d’y éradiquer les terroristes d’Al Qaida qui a commandité les attentats du 11 septembre 201 à New-York. Le premier but des talibans est de chasser les Américains de leur pays. Le second, en découdre définitivement avec le gouvernement de Kaboul qu’ils considèrent comme impie, corrompu et inféodé à l’Occident mécréant. Ces deux objectifs réalisés, le mouvement reprendra le pouvoir qu’il a perdu en novembre 2001 suite des bombardements intensifs de la coalition internationale dirigée par Washington et ainsi réinstaurer l’Émirat islamique d’Afghanistan. Autre raison qui fait que cette volte-face n’est pas vraiment une surprise : des puissances étrangères ne voyaient pas d’un bon œil un accord entre les talibans et le gouvernement de Kaboul qui mette un terme aux attentats meurtriers qui rythment la vie de la capitale afghane. Parmi ces puissances qui prient pour que les pourparlers, entre les fondamentalistes et les modérés au pouvoir à Kaboul, échouent il y a des pays occidentaux qui pour justifier leurs réticences affirment que la première victime d’une éventuelle paix entre les talibans et le gouvernement Kaboul est la femme afghane qui risque donc de revivre les temps de l’esclavage d’avant les années Hamid Karazai, élu président le 13 juin 2002 grâce au soutien des Américains. Côté pays musulmans qui affichent des réserves quant à cet accord : l’Arabie saoudite. Le royaume wahhabite fâché avec ses cousins du Qatar vivrait mal le grand succès diplomatique que cet émirat gazier a tiré de la signature sur son territoire d’un accord cher à un Donald Trump en pleine campagne électorale et en mal de victoires même symboliques. L’échec de ce deal qui devait permettre à Trump de réaliser une de ses promesses électorales de 2016 à savoir le « retour des boys au pays » gâcherait la fête au Pakistan, véritable artisan dudit accord. Riyad déteste tellement le premier ministre pakistanais Imran Khan que son homologue et ennemi indien l’ultranationaliste antimusulman Narendra Modi a été invité Riyad où il y a été accueilli en fanfare le 28 octobre 2019. À noter qu’en vertu de l’accord de Doha, les Américains et leurs alliés s’engagent à retirer toutes leurs troupes d’Afghanistan sous quatorze mois si les insurgés respectent les termes de l’accord, dont l’ouverture de discussions entre les insurgés et Kaboul visant à mettre en place une paix durable.
M. Trump a déclaré que 5 000 soldats américains quitteraient l’Afghanistan d’ici mai et qu’il rencontrerait les dirigeants talibans dans un proche avenir, sans préciser où. Peine perdue et demi-victoire pour Trump.