La directrice générale, qui a déserté son bureau au siège de l’établissement à Casablanca, soupçonne quelqu’un de malintentionné de chercher à lui faire du mal.
La rédaction
Plusieurs jours après sa mort tragique, Hajar E. n’a pas fini de faire parler de son drame. Une agression d’une extrême violence qui l’a conduite au CHU de Fès où elle a succombé à ses blessures dimanche 13 avril après deux semaines en soins intensifs. Le Maroc est consterné. Horrifié. Sous le choc. Entre indignation et incompréhension. Originaire de Khemisset ou elle été enterrée, Hajar E. était une enseignante de français dans l’institut de formation de l’OFPPT à Erfoud. Dans la journée du jeudi 27 mars, soir les derniers jours de Ramadan, elle subit sur la voie publique une attaque féroce. Plusieurs coups de hache sur la tête. L’assaillant est un élève stagiaire de la victime âgée de 29 ans. La vidéo de l’agression qui avait fait le tour des réseaux sociaux a suscité une vive vague d’émotion dans tout le pays. Comment cela est-il possible ? Après les établissements scolaires, la violence gagne désormais les centres de formation professionnelle ! Le Maroc de l’éducation et de la formation est très mal barré. Mais qu’est- ce qui explique un tel acte de violence démentielle ?
En l’absence d’une communication officielle sur le mobile potentiel de ce crime odieux, une hypothèse a fortement été relayée : l’élève aurait été amoureux de sa formatrice qui aurait réagi de manière barbare à sa décision de lui faire changer de classe pour ne plus subir ses actes de harcèlement à répétition. L’assassin aurait commis son terrible geste sous l’emprise de la drogue. Tout a été dit sur les violences envers les personnels d’éducation. Un phénomène qui n’est pas exclusif au Maroc- il fait rage sous d’autres cieux- et commence à prendre de l’ampleur en faisant partie du vécu des établissements scolaires. Mais avec l’assassinat odieux de Hajar E, un dangereux palier a été franchi dans la violence dans les établissements d’enseignement public qui s’enfoncent dans une crise multiforme sans fin. Pendant que les réactions d’indignation affluent sous le hashtag (#NousSommesTousHajar), l’employeur, lui, est resté silencieux. Aucun communiqué de condamnation de cette attaque abjecte ni de solidarité avec Hajar qui était alors entre la vie et mort. Un silence troublant que de nombreux cadres de l’établissement n’ont pas compris, surtout qu’il s’agit d’une collaboratrice de l’OFPPT. « Un grand merci à Tik Tok qui a révélé au grand jour ce drame via la vidéo de l’agression mortelle de notre collègue, autrement, la tragédie aurait certainement été étouffée », déclare un formateur sous couvert de l’anonymat.
Quant aux syndicats, ils ont attendu l’annonce du décès de la victime pour qu’ils se manifestent, à travers un communiqué, de la Fédération nationale de l’enseignement (FNE, affiliée à l’Union marocaine du travail) qui appelle à une mobilisation forte et à des actions de protestation durant les journées des 14 et 15 avril dans tous les instituts de formation, ainsi qu’à une grève générale le mercredi 16 avril dans la région Draâ-Tafilalet. Mais où est passé donc le management de l’OFPPT ? Ce qui s’est passé à Erfoud n’est-il pas assez grave pour faire monter au créneau la directrice générale Loubna Tricha ? Au fait, cela fait un bon moment qu’elle n’effectue plus de sortie médiatique, poussant la discrétion jusqu’à boycotter son bureau au siège de l’office à Casablanca, où elle ne met les pieds que très rarement. Sur les raisons de ce boycott mystérieux, une histoire extravagante circule depuis quelque temps dans les couloirs de l’office et de ses directions régionales : Mme Tricha soupçonne quelqu’un de malintentionné de lui avoir jeté un mauvais sort ! Et ce n’est pas une blague.
La directrice générale le sait parce qu’elle a confié à des proches souffrir immédiatement de maux de tête aiguës, un symptôme développé, paraît-il, par les gens victimes de magie noire, dès qu’elle met les pieds dans son bureau. La douleur est tellement vive avec la sensation désagréable d’avoir le crâne serré dans un étau qu’elle a dû à maintes reprises appeler à l’aide son assistante pour lui attacher un foulard autour de la tête, histoire de la soulager. Et si Loubna Tricha souffrait simplement de migraine qui entraîne les mêmes symptômes ? L’intéressée balaie cette remarque d’un revers de la main, maintenant sa thèse du mauvais sort à laquelle elle croit dur comme fer, arguant qu’elle se sent aussi mal dans sa peau. Des événements surnaturels se déroulent -ils à l’office ? Qui cherche à nuire à la patronne et pour quelles raisons ? A-t-elle fait appel aux services d’un bon fkih pour des séances de désensorcellement et de protection contre le mauvais œil? A ce stade, on ne sait pas si des esprits maléfiques, les fameux jnoun, rôdent réellement autour d’elle et qui est éventuellement à l’origine de cette diablerie supposée ou s’il s’agit de la part de Mme Tricha d’une tendance à l’affabulation entretenue par son entourage…? Vivement une enquête à la X-files !
En attendant, force est de constater que les prétendus ensorceleurs ont atteint leur objectif inavoué si celui-ci était de faire éloigner la patronne du siège de l’office. Pour fuir ce casse-tête ésotérique, cette dernière a établi depuis deux ans environ son nouveau quartier général à l’Institut national du cheval (INC), implanté dans un écrin de verdure, à Rabat, où elle s’est fait aménager un bureau. L’enthousiasme des premières années ayant suivi sa nomination à la tête de l’office en 2018 a cédé la place à un sentiment de démobilisation. » Beaucoup de cadres au sein de l’office se sentent désorientés », confie un responsable. Face à cette situation de crise qui ne dit pas son nom, le ministre de tutelle Younes Sekkouri a du mal à réunir le Conseil d’administration faute d’interlocuteur », renchérit un autre. A tous les étages de l’établissement où règne une ambiance délétère, les langues commencent à se délier. Depuis que Loubna Tricha a lâché prise, c’est la direction des ressources humaines et l’assistante de la directrice générale « ensorcelée » qui jouent les patrons. Comme par magie!